cryothérapie, déplacements à domicile, bilans et entrepreneurs individuels

La Cour de cassation, par un arrêt du 10 mai 2022, est venue affirmer que la cryothérapie « corps entier » à des fins médicales est un acte de physiothérapie dont la pratique est réservée :

  • aux docteurs en médecine si elle aboutit à la destruction des téguments (tissus qui recouvrent le corps – peau, poils, etc.) ;
  • aux kinésithérapeutes intervenant pour la mise en œuvre de traitements sur prescription médicale à condition qu’elle ne puisse aboutir à une lésion des téguments.

Cet arrêt censure celui de la cour d’appel de Nancy en date du 15 février 2021 qui considérait qu’aucun texte n’interdisait la pratique de la cryothérapie « corps entier » à d’autres professions que celle de médecin et de kinésithérapeute.

L’affaire est renvoyée devant la cour d’appel de Paris chargée de juger à nouveau les faits à l’aune du principe dégagé par la Cour de cassation afin de déterminer si une faute civile a été commise.

Décision n’005-2019 du 17 février 2022, section des assurances sociales du Conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes

« Dans cette affaire, la Caisse primaire d’assurance maladie de la Gironde a procédé à un contrôle de l’activité d’un masseur-kinésithérapeute. A l’issue de ce contrôle, la Caisse a porté plainte contre ce dernier auprès de la section des assurances sociales de l’Ordre des masseurs-kinésithérapeutes pour des faits de facturations frauduleuses, d’actes fictifs, de falsifications et de surfacturations. Il lui était également reproché d’avoir établi des facturations liées à des frais de déplacements et majorations pour des déplacements à domicile et interventions de nuit et jours fériés, alors même que ces interventions et déplacements ne figuraient pas sur la prescription médicale.

Rappelons ici que la CPAM a fondé son action sur les dispositions de la nomenclature générale des actes professionnels (« NGAP ») qui prévoient que lorsqu’un acte doit être effectué au domicile du patient, les frais de déplacement du professionnel de santé sont remboursés, en plus de la valeur de l‘acte. En cas d’urgence justifiée par l’état du malade, les actes qui sont effectués la nuit, le dimanche et les jours fériés par les auxiliaires médicaux, donnent lieu, en plus des honoraires normaux (et le cas échéant de I‘indemnité de déplacement), à une majoration.

Pourtant, selon la juridiction, si le grief de facturation de majorations liées à une intervention de nuit, dimanche ou jour férié, sans que l’ordonnance ne mentionne I’urgence ou la nécessité de soins quotidiens, doit effectivement être retenu contre le masseur-kinésithérapeute, elle considère a contrario que les déplacements à domicile n’exigent pas de mention expresse sur l’ordonnance. De ce fait, dans cette espèce, l’instruction n’a pas pu mettre en lumière que les déplacements à domicile effectués auraient été inappropriés par rapport à l’état des patients concernés.

Par conséquent, les masseurs-kinésithérapeutes sont en mesure de faire et facturer des déplacements à domicile alors même que l’ordonnance n’en aurait pas mentionné expressément le recours. »

« L’arrêté du 26 avril 2022 fixant la liste des documents soumis à l’obligation prévue à l’article L. 1111-15 du code de la santé publié au Journal officiel du 30 avril 2022 rappelle le versement obligatoire au dossier médical partagé (DMP) par le masseur-kinésithérapeute du bilan kinésithérapique et de la fiche de synthèse qui retrace le traitement mis en œuvre.

Le masseur-kinésithérapeute, dans le cadre de la prescription médicale, est tenu d’établir un bilan qui comprend le diagnostic kinésithérapique et les objectifs de soins, ainsi que le choix des actes et des techniques qui lui paraissent les plus appropriés. Ce bilan est tenu à la disposition du médecin prescripteur par son versement au DMP.

De plus, le traitement mis en œuvre en fonction du bilan kinésithérapique est retracé dans une fiche de synthèse qui est elle aussi tenue à la disposition du médecin prescripteur dans le DMP. »

Le Conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes a pris connaissance de l’entrée en vigueur au 15 mai 2022 de la loi n° 2022-172 du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante et du décret n° 2022-725 du 28 avril 2022 relatif à la « définition du patrimoine professionnel de l’entrepreneur individuel et aux mentions sur les documents et correspondances à usage professionnel ».  Dès lors qu’il s’applique à toute personne physique qui exerce en son nom propre une ou plusieurs activités professionnelles indépendantes, sans tenir compte des particularités propres à chaque secteur d’activité, le Conseil national n’a pas été consulté sur son libellé.

Nous relayons cette information afin de rappeler aux kinésithérapeutes libéraux les deux régimes juridiques possibles pour exercer en libéral : en tant qu’entrepreneur individuel ou au sein d’une société d’exercice. Votre association de gestion agréée pourra vous aider dans les démarches administratives imposées par cette réforme.

L’exercice en tant qu’entrepreneur individuel

Depuis le 15 mai 2022, un kinésithérapeute qui exerce son activité en son nom propre, à titre individuel relève du statut de l’entrepreneur individuel.

Qu’est-ce que cela change dans les modalités de votre exercice quotidien ?

Il devient nécessaire pour le kinésithérapeute entrepreneur individuel d’utiliser une dénomination reprenant son nom ou son nom d’usage, précédé ou suivi immédiatement des mots « entrepreneur individuel » ou des initiales « EI » pour l’exercice de l’activité professionnelle.

Cette mention doit désormais figurer sur les documents et correspondances à usage professionnel tels que les feuilles d’ordonnance, les annuaires à usage du public et la plaque professionnelle lorsque le kinésithérapeute libéral exerce à titre individuel, indépendamment des autres informations qu’il peut faire figurer sur ses documents professionnels prévues aux articles R. 4321-122 et suivants du code de la santé publique. De plus, chaque compte bancaire dédié à son activité professionnelle ouvert par l’entrepreneur individuel doit contenir la dénomination précitée dans son intitulé.

Désormais, le kinésithérapeute libéral exerçant à titre individuel est tenu de remplir ses engagements à l’égard de ses créanciers dont les droits sont nés à l’occasion de son exercice professionnel seulement sur son patrimoine professionnel, sauf s’il en a convenu autrement. Les biens utiles à l’exercice de l’activité professionnelle d’un masseur-kinésithérapeute libéral exerçant à titre individuel (son patrimoine professionnel) seront automatiquement séparés de ses autres biens (son patrimoine personnel) pour garantir une étanchéité destinée à protéger son patrimoine personnel.

Le Conseil national de l’ordre souhaite rappeler qu’un kinésithérapeute exerçant en tant qu’entrepreneur individuel peut par ailleurs créer une société civile de moyens (SCM) ayant pour objet la mise en commun des locaux, du matériel et du personnel (par exemple une secrétaire) nécessaires à l’activité de ses associés. N’exerçant pas l’activité de kinésithérapeute, une SCM n’a pas à être inscrite à l’Ordre. Chaque associé de la SCM exerce donc la profession pour son propre compte et en son nom propre sous le statut d’EI. Pour la même raison, une SCM ne peut conclure aucun contrat d’assistanat libéral, de collaboration libérale, ni de remplacement. De tels contrats doivent être conclus par les associés de la SCM eux-mêmes

L’exercice en société

S’il n’exerce pas en son nom propre comme entrepreneur individuel, le kinésithérapeute peut exercer en société.

On distingue deux types de sociétés susceptibles d’exercer elles-mêmes la profession de masseur-kinésithérapeute : les sociétés d’exercice libéral (SEL) et les sociétés civiles professionnelles (SCP).

Ces sociétés exercent elles-mêmes leur profession par le biais de leurs membres. C’est la raison pour laquelle :

1° Chacune des SEL ou SCP ayant pour objet l’exercice de la profession de kinésithérapeute a l’obligation d’être inscrite au tableau de l’Ordre des kinésithérapeutes et n’est constituée que sous couvert de cette inscription.

2° Les SCP et les SEL doivent à ce titre conclure elles-mêmes les contrats de collaboration libérale et d’assistanat libéral, ainsi que les contrats de travail. Compte tenu de la spécificité du remplacement qui doit être personnel (article R. 4321-107 du code de la santé publique), le contrat de remplacement est en revanche conclu directement entre l’associé remplacé et le remplaçant.